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Art et méditation - Janvier 2022

Moisés salvado de las aguas

©Museo Nacional del Prado ©Archivo Fotográfico Museo Nacional del Prado

Véronèse, Paul Caliari dit le (Vérone 1528 – Venise 1588), Moïse sauvé des eaux, 1580 environ, huile sur toile, cm 57 x 43, Madrid, Musée du Prado

Mois de janvier.

Femmes de l’Ancien Testament : la fille de Pharaon

Un homme de la tribu de Lévi avait épousé une femme de la même tribu. Elle devint enceinte, et elle enfanta un fils. Voyant qu’il était beau, elle le cacha durant trois mois. Lorsqu’il lui fut impossible de le tenir caché plus longtemps, elle prit une corbeille de jonc, qu’elle enduisit de bitume et de goudron. Elle y plaça l’enfant, et déposa la corbeille au bord du Nil, au milieu des roseaux. La sœur de l’enfant se tenait à distance pour voir ce qui allait arriver. La fille de Pharaon descendit au fleuve pour s’y baigner, tandis que ses suivantes se promenaient sur la rive. Elle aperçut la corbeille parmi les roseaux et envoya sa servante pour la prendre. Elle l’ouvrit et elle vit l’enfant. C’était un petit garçon, il pleurait. Elle en eut pitié et dit : «C’est un enfant des Hébreux». La sœur de l’enfant dit alors à la fille de Pharaon : «Veux-tu que j’aille te chercher, parmi les femmes des Hébreux, une nourrice qui, pour toi, nourrira l’enfant ?» La fille de Pharaon lui répondit : «Va». La jeune fille alla donc chercher la mère de l’enfant. La fille de Pharaon dit à celle-ci : «Emmène cet enfant et nourris-le pour moi. C’est moi qui te donnerai ton salaire». Alors la femme emporta l’enfant et le nourrit. Lorsque l’enfant eut grandi, elle le ramena à la fille de Pharaon qui le traita comme son propre fils ; elle lui donna le nom de Moïse, en disant : «Je l’ai tiré des eaux». (Exode 2, 1-10)

Très peu de l'histoire biblique reste dans le petit tableau que Véronèse a probablement peint pour une figure importante de la république de Venise. Le paysage est tout sauf africain, le fleuve n'est certainement pas le Nil, les vêtements des personnages qui peuplent la scène nous rappellent l'élégance de la mode vénitienne. Il est également probable que le thème du tableau était particulièrement en vogue dans la seconde moitié du XVIe siècle (peut-être parce que le décor fluvial pouvait rappeler la lagune de Venise ?) si l'on pense que Véronèse l'a peint au moins cinq fois (en plus de la version madrilène il y en a aussi à Turin, Washington, Lyon et Dresde).

Pourtant... pourtant, en regardant le tableau, nous sommes sûrs de nous retrouver devant la scène racontée par le livre de l'Exode. Il suffit d'un enfant présenté comme offert, d'un panier dans lequel il était contenu et qui, au premier plan, est entre les mains fermes d'une femme noire, la femme élégamment vêtue au centre d'un petit groupe composé d'autres femmes, on reconnaît qu'elle est la fille du Pharaon, celle qui observe le petit Juif sauvé des eaux du Nil, celle qui l'appellera Moïse, ce qui signifie précisément «sauvé des eaux».

En contemplant la scène représentée par notre peintre, nous sommes frappés à la fois par la beauté et la richesse du paysage (notamment les deux arbres en arrière-plan qui traversent tout le tableau en hauteur) et par la disposition semi-circulaire des personnages, qui commence par la servante tenant le panier en bas à gauche et, à travers les différents serviteurs et la Fille du Pharaon, atteint le fou dont la présence révèle le statut social élevé des personnes présentes.

Mais notre attention ne peut manquer d'être captée par la belle robe et les bijoux portés par la femme protagoniste de la scène. La lumière semble aussi participer à la volonté du peintre de mettre en valeur celle qui est le personnage le plus important. D'autant plus que ce sera grâce à elle que l'ordre de son père – c'est-à-dire de tuer tous les fils premiers-nés des Juifs – sera ignoré et que le petit Moïse retrouve la vie dans la famille qui n'aurait dû vouloir que sa mort. Et je ne pense pas que ce soit même une coïncidence si l'histoire biblique et la peinture de Véronèse nous montrent presque exclusivement la présence de femmes. C'est la femme, la mère, qui en elle-même fait vivre et parvient à imposer la vie même là où la mort est déjà décidée. Et ainsi Moïse, voué à une mort certaine par l'édit du Pharaon, est non seulement sauvé des eaux, mais fait même partie de la famille du Pharaon lui-même, ayant été adopté par sa fille !

Le Dieu vivant, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob, notre Dieu, conduit l'histoire d'une manière qui nous est souvent incompréhensible.

Nous lui confions nos vies pour que l'amour grandisse et que le salut soit donné à travers nous et notre pauvreté dans le monde.

 

(Contribution de Vito Pongolini)